Sol-Tora se tortilla sur sa chaise pour chasser les lancements qui gagnaient le bas de son dos. Son ossature, malgré des années d’habitude, ne parvenait toujours pas à supporter les cent quarante kilos de graisse qui l’entouraient. L’informaticien n’avait jamais passé plus que quelques minutes en position verticale.
Depuis son plus jeune âge il restait assis derrière des consoles tri-dimensionnelles ou bien affalé dans un sofa à contempler les programmes du réseau d’information oligarchique interplanétaire. Sol-Tora était difforme, comme avant lui des dizaines de générations d’habitants des méta-cités de technologie sept. Ses yeux étaient deux fentes sombres au milieu d’un amas de graisse et l’on ne savait jamais si ils vous scrutaient ou non.
A plus de trente ans, il vivait toujours chez sa mère avec qui il communiquait par le biais d’un écran lorsque la nécessité s’en faisait sentir. C’était le plus souvent une demande particulière vis à vis de la nourriture. La dernière fois que cela s’était produit — une semaine auparavant — il n’avait même pas remarqué qu’elle était montée dans sa chambre lui apporter les plaquettes d’aliments synthétiques. Elle lui avait demandé de sa voix grêle si il voulait autre chose, et Sol-Tora avait émit un grognement indiquant un réponse négative. Il ne faisait plus la différence entre les interlocuteurs numériques avec qui il conversait et la vieille femme derrière lui, sa mère. Son travail le passionnait, ce n’était d’ailleurs plus vraiment un travail pour lui puisqu’il continuait exactement la même activité dans sa minuscule chambre que dans les locaux de la firme qui l’employait, la gigantesque compagnie de production agro-alimentaire Franentil.
